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Professionnels libéraux en établissement, quelles relations ?

Le 31 décembre dernier, le gouvernement publiait au Journal Officiel un décret (n°2010-1731) relatif à l’intervention des professionnels de santé exerçant à titre libéral dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes.
Pour le législateur, comme pour les cabinets, cette intervention, tout en étant réalisé sous le mode libéral et donc excluant tout lien de subordination induit dans un contrat de travail, répond à des conditions particulières d’exercice qui doivent être précisées dans un contrat devant être conclu entre le professionnel de santé et le directeur d’établissement d’ici fin mars.

Ce contrat prévoit également les modalités de rémunération du professionnel de santé pour sa participation à une réunion annuelle de la commission de coordination gériatrique organisée par le médecin coordonnateur de l’établissement.

En application du droit au libre-choix, chaque personne hébergée est susceptible de choisir un ou plusieurs professionnels de santé de son choix. C’est pourquoi le décret prévoit que le contrat de séjour qui régit les rapports entre le résident et l’établissement mentionne expressément la nécessité, pour un professionnel de santé libéral, de conclure le contrat prévu par ce texte.

Ce décret a suscité plusieurs réactions, dont celle du Conseil national de l’Ordre des médecins qui, le 6 janvier dernier, annonçait avoir déposé un recours devant le conseil d’Etat. Sur le principe, le Conseil de l’Ordre se demande si ce décret n’opère pas un changement de nature des résidences, en faisant de « véritables centres d’hospitalisation où les patients n’auront plus le choix de leur médecin ». Dans son argumentation, le Conseil de l’Ordre indique que les contrats prévus« limitent voire suppriment le libre choix du patient au moment où il est admis en Ehpad ». Le Conseil de l’Ordre critique également la possibilité, pour le directeur d’établissement, la faculté de résilier « sans motif particulier » le contrat passé avec un professionnel de santé, lui enlevant ainsi la possibilité d’exercer sa mission auprès de son patient.

Début mars, seuls 15 % des médecins concernés auraient déjà signés ces contrats, indiquait le Conseil de l’Ordre, alors que plusieurs syndicats médicaux faisaient état d’informations contradictoires, évoquant même une suspension de la mesure.

Le 18 mars dernier, Xavier Bertrand, ministre du Travail, de l’Emploi et de la Santé précisait le débat. Confirmant l’application de la mesure, il indique que pour tenir compte des retards liés aux « interrogations des professionnels libéraux », ces contrats pourront être signés au-delà du 1er avril. Il indiquait également qu’un premier bilan de la mesure serait réalisé au 30 juin prochain.

Sur le fond, le Ministre a précisé que, s’agissant du recours sur les contrats-types, le Conseil d’Etat « saisi de cette question a validé le dispositif comme préservant cette liberté ». Le Conseil d’Etat est en effet saisi, pour vérification a priori, des textes à paraître.

Alors que les organisations syndicales de médecins s’interrogeaient sur les dérives possibles quant aux rémunérations, et leur transformation en salaires, le Ministre « confirme que le principe reste la rémunération à l’acte » et que l’absence de lien de subordination excluait toute requalification.

Ce débat juridique n’est donc pas clôt et nul ne doute qu’il intéresse toutes les parties prenantes.